Les métaphores et l’hypnose
Définition :
La métaphore, du grec μεταφορα (metaphorà = transport), est une figure de style qui se base sur l’analogie. Elle désigne une chose par une autre qui partage avec elle une qualité essentielle ou une ressemblance.
La métaphore n’est pas une comparaison. La comparaison affirme une similitude : « Mon jardin en fleurs, c’est comme le paradis », alors qu’une métaphore la sous-entend : « Mon jardin, mon coin de paradis fleuri ». On peut ainsi, avec la métaphore, traduire une pensée de manière plus complexe, et donc plus riche, que l’on aurait pu le faire avec un vocabulaire descriptif basic.
Les métaphores sont très souvent utilisées dans le langage poétique, mais elles sont également employées dans la vie de tous les jours : « J’ai tendance à voir le verre à moitié plein » et parfois de manière discrète : « un chemin de fer, le bras d’un fauteuil, les cordes vocales ».
Les différents types de métaphores :
La métaphore simple
Elles sont utilisées très couramment et permettent d’imager et mieux expliquer des notions complexes. Par exemple : « les nerfs sont comme des fils électriques » ou « une transe spontanée, c’est être dans la lune ».
La métaphore est donc un raccourci qui vient simplifier une explication. Par exemple, lorsqu’un patient tente d’exprimer une sensation « J’ai des fourmis dans les jambes » ou « J’ai une barre au-dessus des yeux ».
La métaphore filée
Elle consiste à faire se succéder des métaphores issues d’un même champ lexical tout au long d’une phrase ou d’un discours.
Cette technique est tout à fait adaptée à la préparation d’un patient avant une chirurgie, on parle alors de suggestion préparatrice. Prenons l’exemple de Nicolas G., 45 ans, qui a choisi l’hypnosédation pour son opération chirurgicale. Pour son accompagnement, il prévoit de se rendre en Bretagne faire du bateau. On emploie alors le langage métaphorique tout au long de l’installation du patient dans la pièce : « Je vous invite à laisser les yeux se promener dans la pièce, à choisir le cap qui leur convienne ou à laisser votre regard naviguer, dériver ou bon lui semble, parfois trouver un point d’amarrage ici ou là ».
La métaphore agit alors comme une suggestion très indirecte. Le mot a alors son sens apparent et son sens caché.
Le conte métaphorique
Destinés aux adultes jusqu’au XVIIème siècle, les contes métaphoriques sont ensuite, avec le siècle des Lumières, davantage destinés aux enfants et ont pour but de transmettre des enseignements (courage, amour, respect, etc.) et des valeurs morales. Ces contes métaphoriques sont à double lecture. Par exemple, « Peau d’Âne » est une allégorie de l’adolescence et exprime le tabou de l’inceste, ou « Le Petit Chaperon Rouge » qui est une métaphore des dangers de la sexualité et du choix à faire entre un loup séducteur et dangereux et un bûcheron bienveillant et protecteur. C’est aussi le cas pour les fables de La Fontaine qui traitent de la cour du roi.
Le conte métaphorique est particulièrement adapté à des fins thérapeutiques. On parle alors de métaphore thérapeutique.
Les métaphores dans les thérapies :
Selon Erickson, les vertus thérapeutiques du conte métaphoriques sont de rendre compréhensible une situation complexe ou chaotique grâce aux personnages et aux éléments de l’histoire. Le patient trouve ses propres solutions en entendant l’histoire.
Par exemple, pour faire comprendre à ses patients que le thérapeute n’est là que pour les guider, Erickson racontait l’histoire du garçon et du cheval égaré :
« Un jour, alors qu’il marchait sur un chemin, un garçon trouva un cheval égaré. Il décida alors de monter sur le cheval et de suivre le chemin en sa compagnie. Le chemin avançait au trot, parfois au milieu du chemin, parfois s’égarant sur le bas-côté. Le garçon tâchait alors de le rediriger vers le chemin principal. Finalement, après quelques heures sur le chemin, le cheval s’élança à vive allure pour se stopper devant une ferme. Le fermier reconnut immédiatement son cheval et interrogea le garçon pour savoir comment il avait fait pour le lui ramener. Le jeune garçon répondit alors qu’il ne l’avait pas guidé jusque-là mais que c’est bien le cheval qui avait retrouvé sa route. »
Préparation du patient
La création d’une métaphore thérapeutique repose sur une bonne connaissance du patient par le thérapeute et il est donc crucial que l’anamnèse, c’est à dire l’interrogatoire du patient, ait était convenablement mené. Il faut donc connaître :
- Le problème pour lequel le patient vient nous consulter
- L’émotion qu’a engendré ce problème
- Les ressources du patient (en dehors du problème)
- Le contexte (les ressources lors du problème)
- Les échecs rencontrés lors des tentatives de résolution du problème
- L’objectif souhaité
Ainsi, les métaphores se doivent d’être non menaçantes et de favoriser l’indépendance du patient pour lui permettre de dépasser ses propres résistances. Elles ont pour but de séduire le patient et de lui faire développer sa créativité. Les similitudes entre certains éléments du récit et la situation du patient lorsqu’associées à la voix du thérapeute (rythme lent, modulation du timbre de voix, pauses et silences, etc.), génèrent une certaine confusion qui va favoriser la dissociation. Afin d’atteindre cet état de dissociation, il est important que le patient soit bien installé dans sa transe. Il est donc conseillé de passer par une étape intermédiaire entre l’induction et la métaphore. Inviter le patient à se rendre dans son lieu de sécurité est une technique adaptée pour commencer le travail. Ainsi la métaphore est racontée une fois que le patient est installé dans sa transe.
La construction de la métaphore
Pour être efficace, une métaphore doit être composée d’éléments qui apporteront un cadre au récit du thérapeute et présenter des étapes distinctes qui illustreront l’évolution de la situation des personnages dans le récit.
- Le temps : La métaphore débute par une désorientation temporelle (il était une fois, il y a très longtemps, etc.) qui a pour but d’ouvrir un monde où tout est possible pour le patient. Cette désorientation temporelle permet de mettre de la distance entre la situation du patient et celle présentée dans le récit.
- Le lieu : Il faut maintenant « planter le décor » de la métaphore. Pour construire ce décor, on utilise des éléments sensoriels (Visuels, Auditifs, Kinesthésiques, Olfactifs et éventuellement Gustatifs).
- Le héros : Il ne s’agit pas du patient ou d’un personnage trop proche de lui. Le héros doit pouvoir offrir une possible assimilation par le patient.
- Le problème : Il est représenté dans le récit par une tâche à accomplir, une difficulté à surmonter, une bataille à remporter. Ce problème n’est pas forcément proche de celui du patient mais il doit traduire un parallélisme avec son contexte émotionnel (anxiété, difficulté, impuissance, peur, dégoût, tristesse, etc.)
- Les ressources du héros : Elles peuvent être celles du patient et peuvent également contenir des ressources communes (objet magique, ancêtre, animal magique, etc.)
- Les échecs rencontrés : Dans un premier temps, le héros du récit doit se retrouver confronter à l’échec malgré les solutions qu’il a employées. C’est alors le désespoir et l’anxiété que la situation génère chez le héros qui résonnent pour le patient. À ce moment du récit, l’évolution de la situation semble conduire à une impasse avec un phénomène de dramatisation de toutes les dynamiques relationnelles ou personnelles. À ce stade du récit, la tension doit être palpable.
- La rencontre salvatrice : Elle se matérialise dans le récit par une rencontre ou l’intervention d’un élément extérieur. Cet événement représente le thérapeute. Il va alors permettre le dénouement de la situation conflictuelle dans laquelle se trouve le héros.
- La résolution du problème : Cette résolution peut prendre plusieurs formes : un apprentissage, une guérison, une victoire, un changement, etc. À ce stade du récit, il est important d’intégrer de nombreux éléments sensoriels dans la description du récit. L’idée est que le patient ressente ce changement ou cette guérison et qu’il en constate les effets bénéfiques.
- La conclusion : Cette conclusion inclus une grande fête ou encore une fin ouverte qui laisse la place à la créativité du patient pour qu’il s’approprie la métaphore et le changement qu’elle entraîne. Le thérapeute peut aussi choisir de laisser au patient le soin de terminer la métaphore pour évoquer la conclusion au cours d’une séance ultérieure.
Trouver l’inspiration quand on est thérapeute
La création d’une métaphore dédiée à un patient et à la situation qu’il traverse demande de l’imagination et de la créativité au thérapeute. Pour partager leurs expériences et permettre à d’autres de trouver plus facilement l’inspiration, de nombreux thérapeutes ont compilés des métaphores qu’ils ont eux-mêmes utilisées lors de rencontres avec des patients.
Chez Campus Emergences, nous proposons donc certains de ces ouvrages recommandés par nos formateurs dans notre boutique :
- Jardiniers, Princesses et Hérissons de Consuelo C. Casula
- Nuagismes, scripts d’hypnose de Jean-Michel Hérin
- Métaphores hypnotiques pour accompagner les patients lors de soins techniques de Geneviève Perennou
- Métaphores et suggestions Hypnotiques de Dr. Corydon Hammond