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Hypnose et cancérologie

Dr Farcy-Jacquet Marie-Pierre, oncologue radiothérapeute, psycho-oncologue Rennes , institut emergences, janvier 2007.

cancer
Article ∙ Cancer

INTRODUCTION

Intégrer les outils de l’hypnose Ericksonienne dans une consultation de cancérologie permet d’établir un niveau de relation tel qu’il autorise le cancérologue à informer le patient de sa maladie, d’une récidive, d’un projet thérapeutique lourd dans un climat de confiance et de sécurité.

Parallèlement à l’interrogatoire classique, le cancérologue remplira les quatre boîtes des ressources, des orientations sensorielles prépondérantes, des croyances, et des résistances afin de tisser, dans le déroulement de la consultation, un soutien cohérent, adapté au patient.

En s’approchant dès la première consultation du langage explicite et implicite du patient, l’annonce du cancer ou d’un projet thérapeutique lourd, bâtie sur la base solide construite par et pour le patient, reste intelligible. Ainsi le sujet atteint de cancer reste au centre de son histoire et de son épreuve thérapeutique.

Cette présentation s’attachera à rappeler en premier lieu quelques données non exhaustives concernant les mécanismes d’adaptation à la maladie cancéreuse, pour décrire ensuite les différentes interventions possibles à différents moments de l’histoire de la maladie, basées sur l’approche ericksonnienne.

L’ADAPTATION PSYCHIQUE À LA MALADIE CANCEREUSE ET À SES TRAITEMENTS

L’annonce du cancer reste un traumatisme psychique majeur. Lors des “états généraux du cancer” qui donnèrent la parole aux patients, ceux-ci ont décrit cet anéantissement brutal au moment de l’annonce, ce basculement de la vie, ce choc, cette certitude que rien ne sera plus comme avant.

La peur de mourir entraîne une remise en question profonde tant sur le plan personnel que sur le plan des relations avec le monde environnant. Cette phase d’adaptation à la maladie et à ses traitements prend du temps. Pour 70 % des patients, cette phase d’adaptation dure environ 3 mois, le patient va passer par plusieurs étapes, adopter différentes positions au cours de cette recherche d’un nouvel équilibre incluant cette nouvelle et lourde expérience.

Le tableau I décrit les différentes positions possibles observées chez les patients atteints d’une maladie somatique grave, qui s’adaptent à la maladie cancéreuse. Différentes positions, allant de la toute puissance avec un sentiment d’injustice, de révolte, une agressivité souvent mal ressentie par la famille et les soignants, ou à l’inverse une position basse, alliant impuissance, résignation, voire fatalisme… Il s’agit d’autant de mécanismes de défenses mis en place de façon inconsciente par le patient en fonction de ce qu’il est, de ses expériences vécues, réussies ou manquées, de ses croyances, de son environnement familial et social…

Ces positions quel qu’elles soient sont respectables. L’intérêt est de situer son patient dans cette phase d’adaptation à la maladie, pour adapter son soutien, mettre en place une relation d’aide cohérente.
Il faut souligner les cas particuliers comme le déni, qui, lorsqu’il est partiel, transitoire, fluctuant, ou concomitant à une attitude réaliste et lucide, ne gêne pas l’adhésion au traitement, soulage même l’entourage, joue un rôle protecteur qu’il faut respecter; à l’inverse un déni massif, prolongé et stable, met en péril l’adhésion au traitement une attitude adaptée des soignants sera nécessaire. D’une manière plus large, repérer la position adoptée par le patient nous permet de distinguer les adaptations “réussies” ou cohérentes, permettant la poursuite des traitements sans difficulté majeures, des positions plus délicates ne permettant pas au patient de se rééquilibrer dans cette crise qu’est le cancer.

Schématiquement, il est décrit que:

  • 50 % des patients atteints de cancer vivent cette expérience de façon adaptée.
  • 30 % des patients présentent des troubles de l’adaptation avec des réactions émotionnelles ou comportementales excessives ou inadaptées, sans l’effet invalidant des troubles psychiatriques francs.
  • 20 % des patients présentent des troubles psychiatriques caractérisés, crées par la maladie cancéreuse et réactivés par elle.

L’INTRODUCTION DE LA COMMUNICATION HYPNOTIQUE DANS LA PRISE EN CHARGE DES PATIENTS ATTEINTS DE CANCER.

POURQUOI?

Être soignant en cancérologie implique une connaissance sans faille des protocoles thérapeutiques les plus adaptés à chaque cas, un raisonnement carcinologique, une connaissance de la chimiothérapie et de la radiothérapie. C’est notre préoccupation première, donner au patient le traitement le plus performant au jour d’aujourd’hui dans le cadre d’une maladie qui tue.

Or le rôle du soignant est aussi d’élaborer avec son patient une relation d’aide. Il ne s’agit pas juste d’accompagner son patient, il s’agit d’aider le patient à vivre sa maladie et ses conséquences sur la vie personnelle, familiale, sociale, et professionnelle.

Une voie possible est de rechercher à activer les ressources propres du patient:

-Les ressources conscientes: élaboration d’une position, variable dans le temps, où les différents secteurs de vie sont évoqués. Faire savoir appel à des expériences d’adaptation réussies dans des situations passées difficiles (chômage, deuil, accident…).Favoriser la créativité des patients.

-Les ressources inconscientes: place de la thérapie ericksonnienne qui permet de réactiver l’état de ressources, relaxation, différentes techniques pour différents effets à adapter à chaque patient.

COMMENT?

Différentes situations seront envisagées, avec la description de cas cliniques explicites:

  • Annonce du diagnostic et annonce d’un traitement lourd
  • Interventions en cours de traitement
  • Prise en charge des effets secondaires des traitements.
  • Prévoir ou accompagner l’arrêt prévu des traitements et la rupture du lien thérapeutique (qui s’accompagne le plus souvent d’un fléchissement thymique majeur).
  1. L’annonce du diagnostic

L’annonce d’un cancer est un traumatisme. Il est reconnu que lors de cette consultation, le patient, dépassé par la brutalité et la gravité de cette annonce, accuse le plus souvent une sidération psychique, une dissociation psychique. La conséquence directe en est une possible absence d’intégration du diagnostic, le patient est incapable d’enregistrer les informations faisant suite à cette annonce.

Dans le cadre de la mise en oeuvre du plan cancer, s’attachant à prendre en charge le patient dans sa globalité et dans sa réalité psychique, des recommandations sont faites aux professionnels de santé lors de cette consultation d’annonce: consultation longue, visant à installer une relation de confiance, dans un lieu calme, programmée en début de journée du lundi au jeudi, l’utilisation de mots simples, la compagnie d’un tiers,la remise de documents d’information, et la possibilité de revoir le patient très rapidement après cette première consultation afin de faire le point sur l’état psychique du patient et sur la réalité des informations retenues.

Pour ma part, avant d’être formée à la thérapie ericksonnienne, je n’étais pas formée de façon spécifique à la relation d’aide, à la communication, je m’attachais à essayer de mettre en place une bonne relation soignant-soigné faisant appel à l’authenticité, à l’empathie, au respect du patient et de ses valeurs. Il m’est apparu lors de cette formation que l’on peut aller plus loin dès que l’on perçoit ce qu’est “être en relation”, ce que l’on transmet avec ce que l’on dit mais également avec la façon de le dire, son positionnement dans la pièce, son langage non verbal…
Il n’y a pas de bonne façon d’annoncer une mauvaise nouvelle, mais la technique de communication hypnotique peut être d’une grande aide, permettre au médecin de suivre pas à pas le patient dans le moment de cette annonce, et permettre au patient de ne pas perdre pied, de rester dans un contexte connu de lui.

Lors de l’interrogatoire du patient et du recueil des informations liées au patient, l’observation médicale classique s’attache à relever le contexte social du patient, ses antécédents médicaux personnels et familiaux, son traitement médicamenteux, l’histoire de la maladie. Suit ensuite l’examen médical, l’examen des pièces complémentaires, et se dégage alors le diagnostic et une conduite à tenir, un projet thérapeutique.
Lors du recueil de ces informations, quelques minutes supplémentaires vont nous permettre de questionner le patient sur ses croyances, de repérer avec lui son axe sensoriel préférentiel, de repérer son langage, le vocabulaire qu’il utilise pour décrire sa situation, l’on peut également repérer ses ressources (loisirs, créativité, expériences passées difficiles avec mise en oeuvre d’une stratégie d’adaptation spécifique, caractère réussi de cette adaptation)…

L’intérêt d’un tel partage est d’installer une co-relation basée sur le savoir faire du patient, nous l’informons, mais nous devons nous informer de qui il est, de ses capacités ou ressources afin de nous appuyer sur celles-ci pour lui transmettre l’information de façon équilibrée, chacun des associés de la relation amène quelque chose.

Ce recueil d’informations permet aussi l’ancrage du patient ici et maintenant, de prévenir ou d’anticiper ce moment où le patient “”décrochera” de l’entretien, rentrera dans cette phase de sidération. Reprendre alors non pas l’annonce du diagnostic ou du traitement, mais un élément propre au patient permet le plus souvent de “rattraper” le patient de rester en contact avec lui. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que malgré ces précautions, cette dissociation survient le plus souvent, elle est protectrice, il faut aussi savoir la respecter.

L’annonce du diagnostic et de ses traitements se fait de façon progressive lors de l’entretien. Dès qu’un élément de l’annonce est perçu de façon négative (le soignant le sait le plus souvent), l’on peut s’attacher à ne pas finir sa phrase sur cet élément négatif, mais la continuer avec un élément plus positif ou plus neutre. Chaque information négative doit pouvoir être suivie d’une connotation positive pour donner au patient une solution possible (annonce d’une mammectomie et possibilité de reconstruction, annonce des effets secondaires des traitements et des solutions que l’on utilise pour les contrer…) Cette technique permet de tisser un tissu de soutien autour du patient, permet d’éviter de le plonger dans une situation où il n’aura aucune solution, aucun repère.

Enfin, travailler ainsi permet de connaître le langage du patient, ses voies de raisonnement. En s’adaptant à ses ressources, l’information pourra être traitée par le patient de façon directe avec ses propres outils.

CAS CLINIQUE 1 /Annonce d’un traitement lourd et langage du patient

M. D., 60 ans, est atteint d’un cancer de la prostate dont le traitement associera hormonothérapie et radiothérapie conformationnelle sur 7 semaines, 1 séance par jour, avec pour effets secondaires essentiels le risque d’une cystite ou rectite radique (inflammation des muqueuses), rétrécissement urétral, impuissance.

Ce patient est militaire de carrière (artilleur), “droit dans ses bottes”, impossible de chercher à “édulcorer” l’information. L’authenticité est de mise, ainsi qu’une relation équilibrée “on ne la lui fait pas!”. Il est colonel en retraite, a fait la guerre d’Algérie, a beaucoup bougé en métropole changeant d’affectation régulièrement.

Une première étape sera ici de ratifier les ressources du patient: engagement, adaptabilité, souplesse, fiabilité, endurance, combativité, courage, adaptabilité au changement, en les reliant aux expériences passées.

La seconde étape sera d’utiliser le langage du patient de façon analogique à celui qui décrit la radiothérapie pour aboutir à l’utilisation d’un langage commun

-Langage du patient: stratégie de combat, technique de tirs, angles et puissance de tirs, impact, cibles, personnes civiles à protéger…

-Langage du radiothérapeute: balistique de traitement, choix de l’angle des faisceaux, choix de la dose, choix de l’énergie du rayonnement, protection des organes sains (vessie, rectum)…

Ce langage commun associé à la connotation positive des ressources propres du patient lui permet de rester au centre de son histoire et de son projet thérapeutique.

Le traitement s’est déroulé en toute confiance, sans complication avec une bonne adaptation, le patient est en rémission complète de sa maladie, et, à chaque rencontre, la “co-relation” persiste.

CAS CLINIQUE 2/ diagnostic d’une dissociation psychique, non adaptative.

Mme L., 46 ans, est en cours de traitement par chimiothérapie et radiothérapie lorsque je la vois pour la première fois lors d’une consultation dite de surveillance en cours de traitement.
Je vois la patiente à sa demande et à celle de la famille car elle est inquiète: depuis quelques temps, elle décrit des troubles de la mémoire, oublie où elle a garé sa voiture, oublie les coups de téléphone qu’elle reçoit. Elle se dit être là et pas là, “à côté de ses pompes”. La famille demande un scanner cérébral à la recherche d’éventuelles métastases.
En interrogeant la patiente, il s’avère que cet état s’est mis en place lors de l’annonce du diagnostic. Depuis cet entretien auquel elle fait référence sans cesse, elle est “perdue”, ne comprend plus rien… Je reprends alors avec elle le fil de son histoire depuis ce moment précis, chaque cure de chimiothérapie, la perte des cheveux, la radiothérapie actuelle et ses effets sur la peau. Tout est remis dans l’ordre, et en mouvement. Je lui parle aussi de cette dissociation psychique fréquemment observée dans ces cas, ce qui la rassure. Il s’avère simplement que chez elle, cette dissociation est restée en place longtemps, l’empêchant de reprendre le fil de sa vie.
Mme L. va déjà mieux, elle est reconnue dans son processus, et avoir repris tout le fil de son histoire lui permet visiblement de se recentrer. Je l’examine ensuite, examen clinique complet qui permet d’une part de confirmer la normalité de l’examen neurologique, mais qui permet surtout à la patiente de réinvestir son corps en répondant aux différentes demandes de l’examen. (prise de la tension, respiration profonde, bloquée, sensations, mobilisation…). La patiente est souriante, elle va mieux, se rhabille… ET je repère à cet instant un élément de son vêtement qui m’avait échappé: sous sa robe, cette patiente porte un tee shirt d’adolescent, c’est celui de son fils me dira t elle plus tard, représentant la gueule grande ouverte d’un crocodile manifestement très agressif. “Depuis quand êtes-vous en colère?” lui demandai-je. Surprise et en même temps amusée, la patiente me répond: “c’est à cause du tee shirt? vous avez raison, je le porte depuis longtemps, depuis que je sais que j’ai un cancer!). Je lui dis alors: “Surtout gardez le tant que vous êtes en colère, c’est important.” Elle comprend et accepte…

Je la reverrai une semaine plus tard: toujours souriante, habillée d’une chemise fleurie ouverte sur un tee shirt blanc: “ Je vais bien; je suis en paix avec moi- même”…

Sans Erickson, j’aurais prescrit un scanner cérébral à cette patiente. Il n’aurait rien révélé, j’aurais alors proposé un traitement anti-dépresseur. Je n’aurais pas su recevoir les informations que cette patiente me donnait…

2.Utilisation de la communication hypnotique en cours de traitement de la maladie cancéreuse.

Même dans le cas d’une bonne adaptation psychique à la maladie, ce qui, nous l’avons vu, concerne 50% des patients, il est important de “voir” ces patients sur le plan psychique. Nous connaissons les difficultés qu’ont ces patients a parfois accepter de voir un psychologue répondant vaillamment “je n’en ai nul besoin”, et être formé à la psychothérapie peut permettre au soignant malgré tout de donner quelques outils supplémentaires au patient:

  • Ratifier avec le patient les ressources qu’il a mises en place pour s’adapter à la maladie lui donne le premier rôle dans cette réussite, lui permet d’engrammer cette expérience réussie pour “plus tard” à l’occasion d’une autre expérience de vie, qui peut ne rien avoir à voir avec le cancer. Connoter de façon positive l’endurance, la volonté, l’engagement, la confiance dont il a fait preuve permet de mettre des mots sur des qualités certaines sur lesquelles il pourra compter à tout moment, qui font partie de son fonctionnement intime.

 

  • Vérifier que le patient est resté en mouvement, et qu’à côté de cet engagement thérapeutique, il conserve des espaces de vie à lui, non dépendants des rendez vous avec l’équipe soignante, est également fondamental. Certains patients cachent bien leur jeu, parfaitement disposés à l’égard des traitements, mais abandonnant toute combativité lorsqu’ils sont chez eux, vivant alors des moments de solitude extrême, sans mouvement, “en arrêt sur image”. Il est important de repérer ces patients qui n’investissent plus leur vie personnelle, intime, une aide spécifique doit leur être accordé car le retentissement à long terme de cet état peut être un véritable syndrome dépressif à l’arrêt des traitements, le patient ne sait plus s’occuper de lui, remplir sa vie. Plus ce temps est long, plus il est difficile de reprendre un mouvement.

Le médecin cancérologue doit donc rester très “affûté” afin de repérer ces éléments au moment des consultations, les identifier pour une meilleure prise en charge, ce d’autant que les services de cancérologie ne sont pas encore tous dotés d’un nombre suffisant de psychologues ou de personnel soignant formé à la psycho-oncologie.

  • 30% des patients n’ont pas pu élaborer une position adaptée à la maladie. Repérer la position choisie par le patient va permettre d’adapter notre discours et notre intervention. Reconnaître “un arrêt sur image” va permettre d’intervenir rapidement. Accepter la crise va permettre au patient d’apprendre, de progresser.

Il peut être très utile chez ces patients de leur apprendre à élaborer lors d’un entretien spécifique un “lieu sûr”. Il s’agit d’obtenir ici lors d’une transe formelle l’élaboration d’un lieu dans lequel le patient se sent bien, en sécurité, un lieu imaginaire ou faisant partie d’un souvenir, dont on décrira très précisément tous les éléments, décor, paysage, odeurs, couleurs, sensations physiques… Les patients pourront ainsi à tout moment, lors d’un traitement ou dans leur cadre de vie, faire appel à ce lieu sûr. Ce besoin de réassurance permanent est en effet très fréquent en cancérologie, les malades interrogent de multiples intervenants pour “recouper” leurs informations. En pratique, il s’agit d’un cercle vicieux où le patient perd toute confiance en lui-même, puis dans les autres puisque aucune réponse n’est satisfaisante. Faire appel à l’hypnose formelle dans ces moments-là peut être très utile, réouvrant in espace sûr propre au patient.

3. Utilisation de l’outil hypnotique dans l’aide au contrôle des effets secondaires des traitements.

Il ne s’agit plus ici d’intervention lors de consultation courante de cancérologie. En effet, la prise en charge des effets secondaires des traitements comme les nausées ou les vomissements par exemple liés à la chimiothérapie requièrent un entretien spécifique, une anamnèse soignée lors de la survenue des symptômes pour intervenir le plus souvent lors de transes formelles, plus longues. L’idéal est alors d’avoir un temps spécifique de consultations pour ces prises en charge. Celles-ci seront également proposées dans le cadre le la prise en charge des douleurs, dans l’accompagnement de soins palliatifs. La place de l’hypnose dans ces situations spécifiques a déjà été largement démontrée.

4.Arrêt des traitements, sevrage du lien thérapeutique.

Un état dépressif à l’arrêt des traitements est fréquemment observé. L’explication la plus logique et la plus décrite est cette impression d’abandon, cette impossibilité pour le patient de vivre loin de son équipe soignante comme si cela représentait un danger et une faille dans laquelle la récidive pourrait s’insinuer. Il s’agit aussi de la rupture d’un lien affectif fort qui ne manque jamais de se créer dans les contextes de partage de la quotidienneté et de la mise en cause du pronostic vital, la rupture d’un attachement fort et profond.

De plus, le temps des traitements a envahi le plus souvent tout l’espace, temporel, physique, psychique pendant plusieurs mois. Quelle expérience de vie a finalement

été cette épreuve? Dépendant et démuni, le patient a pu perdre son essence même, en parant au plus pressé, survivre, s’adapter, et un travail psychique sera nécessaire pour lier l’avant et l’après, pour reprendre le fil et redonner une cohérence, une unité, voire un sens à cette expérience de vie.

L’approche hypnotique permet cette remise en mouvement:

  1. Par la réalisation de transes formelles axées sur les métaphores de réparation, remise en mouvement du corps (activité sportive, marche…), utilisation de la métaphore de l’album photos, moments choisis du traitement, que l’on rangera ensuite…
  2. Par la prescription de tâches:
  • Conclusion écrite par le patient qu’il glissera dans son dossier médical, au même titre que le courrier de fin de traitement du médecin.
  • Choix du lieu de rangement du dossier médical: en dehors de la vue, mais à disposition (accès possible, mais rangé, à sa place)
  • Tenues d’un carnet de bord ou d’un agenda: ratification des ressources mises en oeuvre pendant le traitement, organisation du temps, redéfinition des priorités… .Favoriser la créativité: reprendre une activité laissée de côté, faire enfin ce que l’on voulait faire depuis temps d’années…

 

CONCLUSION

La prise en charge globale du patient atteint de cancer est devenue une priorité. La prise en charge psychique de ces patients fait l’objet de nombreuses recommandations, et la mise en oeuvre de moyens adaptés est en cours avec le recrutement de psychologues, la formation du personnel soignant à la psycho oncologie.

Différentes approches psychothérapeutiques sont utilisées, approche psychanalytique, comportementale, sophrologie, relaxation… L’approche Ericksonnienne est une de ces voies possibles, son intérêt est d’être rapidement efficace, permettant de s’adapter instantanément aux demandes et difficultés du patient. L’objectif de ces interventions est de trouver la meilleure adaptation possible à cette expérience thérapeutique en mobilisant les ressources propres au patient, en respectant son langage, ses croyances et en lui permettant ainsi de rester au centre de son histoire.

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